Avec amour

 

« De la paume de mes mains fraîchement lavées, j’ai délicatement effleuré les aliments. Puis, comme on berce une vie nouvelle à peine éclose, un par un, je les ai pris entre mes mains, les ai portés jusqu’à mon visage et, les yeux clos, j’ai parlé avec eux pendant quelques secondes.

Ce n’était pas quelque chose que l’on m’avait appris et je ne savais d’ailleurs pas exactement quand j’avais commencé à le faire, mais avant de cuisiner je suivais toujours le même rituel. J’approche mon visage, mon nez, des aliments, j’écoutais leurs « voix ». Je les humais, les soupesais, leur demandais comment ils voulaient être cuisinés. Alors ils m’apprenaient eux-mêmes la meilleure façon les accommoder.

Ce n’était peut-être qu’une illusion, mais j’entendais bel et bien leur voix ténue. Ensuite, je m’agenouillais en esprit et priais les divinités de la cuisine ».

 

page 80 –  Le restaurant de l’amour retrouvé, de Ito Ogawa ( éditions Picquier).